Note : cette fois-ci, format journal de voyage pour un petit mois de pérégrinations entre Moscou et Oulaan-Baator. Malheureusement, j'ai perdu mon appareil photo, oublié à l'arrière d'un minibus dans la banlieue de la capitale mongole, donc je n'ai ramené aucune photo. Heureusement, ma covoyageuse - Sveta - a elle mieux géré le coup, ramenant ses photos que j'ai utilisées ci-dessous. Fatalement, ce ne sont pas exactement celles que j'aurais voulu mettre ici : l'écriture de ce journal ayant été préméditée, j'avais pris deux photos quotidiennes à cette seule et unique fin. Chaleureusement, je remercie Sveta car ses photos ne collent quand même pas si mal :)


Les Chameaux d'Orient
(Petite excursion sibério-mongole)

Samedi 9 Juillet

J'arrive en fin d'après midi à Sheremetevo II (l'aéroport international de Moscou), revenant d'une conférence d'informatique théorique dans un hôtel luxueux d'où un escalier descendait directement jusque dans les eaux cristallines
de la baie de Mondello, agréablement chauffées par le soleil sicilien, face au Mont Pellegrino et à quelques minutes en bus du coeur de Palerme. Dur métier ! Bref, retour à Moscou, sans même un petit crash malgré la mode de cet été 2005. Et n'ayant plus de foyer à Moscou, je vais squatter à Frjazino, ville satellite de Moscou qui gravite à quelques dizaines de kilomètres du Kremlin.

Mondello

Dimanche 10 Juillet

En fait je n'ai pas choisi Friazino seulement pour sa base militaire secrète, mais parce que c'est là qu'habite Sveta, avec qui j'ai acheté, il y a plus d'un mois, un aller simple en train pour Irkutsk, suite à une décision prise en commun un jour de Janvier où, ayant glissé sur la glace trottoirienne particulièrement bien polie à cet endroit, ma tête a violemment heurté un socle de lampadère. Sveta a vingt ans et fait un mi-temps de secrétariat (option visa) au labo de maths où je suis, un plein-temps de linguistique théorique (options arabe et hollandais) à l'université, et trois heures de transport par jour (métro + bus jusque chez ses parents à Friazino) pour remplir le temps qui reste...Elle vient en fait juste de quitter son boulot au labo pour se consacrer exclusivement à la linguistique à partir de la rentrée. En attendant, stage de mongol avec un Français : départ à 14h40 devant le panneau "km 0" du transsibérien.

km0

Lundi 11 Juillet

Pour garder les bonnes habitudes, on voyage en platskartnij (le wagon-dortoir pour ceux qui ont loupé les derniers épisodes). Après Jaroslav et Danilov hier, on se réveille vaguement à 6h30 pour entendre nous rejoindre à Kirov ceux qui seront nos voisins jusqu'à Krasnoiarsk, grosse ville à un peu plus de cinquante heures de trains d'ici. On fera petit à petit connaissance avec eux : une jeune femme, son enfant d'un an (rude voyage pour lui !) et sa belle-mère d'un côté, une mère caractérielle et sa gamine de 5 ans qui ne sait pas rouler les "r" de l'autre côté. Plus loin, on repère au nez la présence d'un groupe d'amateur de poisson séché et de bière (la nuit on les repère à l'ouïe : concert de ronflements dans tout le wagon). A 15h on est à Perm', avec toujours à peu près le même paysage. En fin d'après-midi moins de bouleaux et plus de sapin, jusqu'à l'arrivée vers 21h à Sverdlosk (Ekaterinbourg...mais que ça soit dans la gare de Moscou, dans la gare locale ou dans le train, nul part le nom soviétique de Sverdlovsk n'a été changé). La densité un peu plus élevée de sapins semble donc l'unique chose à laquelle on peut reconnaître l'Oural dans ce coin là...

oural

Mardi 12 Juillet

Depuis ce matin 7h, après Tjumen, on roule dans la plaine de Sibérie occidentale. Parfaitement plat, parfaitement marécageux. Les arbres sont assez rares, par bosquets, et on voit bien près des voies que le sol n'est qu'une vaste éponge alternant trous d'eau et touffes d'herbes de zones marécageuses. Les poteaux électriques en bois sont attachés à 1m du sol sur des "sous-poteaux" en béton (pour ne pas pourrir ?) mais balaient de toutes façons un éventail
assez varié d'inclinaisons, selon qu'ils sont plus ou moins enlisés dans le sol. Plus on descend vers le sud, plus il fait chaud, ce qui est assez pénible car notre fenêtre ne s'ouvre pas. Il fait 30° dans le wagon à midi, quand nous arrivons à Omsk. A part cette (grande) ville, à peu près aucune présence humaine dans la campagne de toute la journée, jusqu'à l'arrivée de nuit à Novosibirsk vers 21h. D'ailleurs il n'est pas du tout 21h ici...ma montre est à l'heure de Moscou et il y a environ une heure de décalage horaire chaque jour. Des journées solaires de 23h en fait, et - en tous les cas pour ma part - je constate que levers et couchers du Soleil déterminent bien plus mon rythme circadien que ma montre, nos repas ou une hypothétique "horloge interne"...Michel Siffre a bien fait de se mettre à l'ombre pour ses expériences.

Plaine marécageuse de Sibérie occidentale

Mercredi 13 Juillet

Midi, le Soleil se lève et nous arrivons à Krasnojarsk (l
'heure de Moscou est l'heure de référence à l'échelle du pays dans tous les trains et gares et billets). Le paysage a subrepticement changé pendant la nuit : la campagne est relativement peuplée tout le long de la ligne : des maisons en bois partout, avec - sans exception aucune - des potagers magnifiques, grands et entretenus avec soin. Les patates dominent largement, mais il y a également tomates, cornichons russes, carottes et sans doute pas mal d'autres trucs difficiles à reconnaître par la vitre du train. Il y a plein de collines, assez grandes et généralement herbues avec quelques touffes de résineux accrochées au sommets des pentes. Nos voisins de Kirov nous quittent. Il reste notre voisin "magique", monté à Sverdlovsk et qui n'a encore rien mangé depuis alors (presque 40h). Il reste sans bouger, étendu sur sa couchette à lire un journal en chinois qui constitue son seul bagage (d'ailleurs il a l'air chinois, tout concorde). Mais aujourd'hui, pas de chance, des policiers passent dans le wagon et (contrôle au faciès oblige) lui font habilement remarquer que son visa russe a expiré depuis un peu plus de 2 ans...hop voilà notre chinois magique qui est emmené ; j'ai peur qu'ils ne le balancent par la fenêtre, mais non il revient apparemment entier après quelques dizaines de minutes. Déclaré insolvable ou ayant payé un pot-de-vin pour pouvoir continuer ? A Irkutsk il sera encore là, toujours sans avoir rien mangé.

Potagers sibériens

Jeudi 14 Juillet

Nous arrivons à Irkutsk à 6h20 (11h20 heure locale), après 87h de voyage. Ouf ! Après quatre jours sans douche dans un train où la température diurne tourne autour de 30°, le plan est de traverser la ville avec nos gros sacs sur le dos  jusqu'à notre "contact" local, une certaine Olga. Elle a une trentaine d'années et travaille dans la filiale locale de la boîte où bosse la mère de Sveta (ma covoyageuse, rappel) à Friazino : fabrication de prothèses auditives en gros et demi-gros. Venu une semaine à la maison-mère moscovite pour un stage, elle y a brièvement rencontré la mère de Sveta. Donc ni Sveta ni a fortiori moi ne l'avons jamais vu avant d'arriver chez elle, crasseux et sans logis en ce jour de lointaine fête nationale. Mais d'abord, Sveta doit obtenir un visa pour la Mongolie. Moi, je l'ai eu facilement à Moscou en tant que non-Russe, mais il fallait une invitation du ministère de l'intérieur pour Sveta (selon la loi du talion). Notre secret espoir était qu'ils soient moins formalistes au consulat d'Irkutsk, plus proche du pays...fol espoir, vite démenti par les autorités consulaires locales. Nous voilà donc assis sur le trottoir, face au consulat, dépités et la bière à la main, sous un beau ciel bleu rêvé pour traverser
à dos de chameau laineux les vertes steppes mongoles...qui nous étaient impitoyablement fermées ! Mais un bonhomme assez classe sortant du consulat et se dirigeant vers son gros 4x4 rutilant neuf, nous voyant penauds et suants avec nos gros sacs, nous fait signe d'approcher...et embarque Sveta, direction son bureau avec une promesse d'invitation pour la Mongolie car "on a de bonnes têtes" (sic). Contre toute attente, notre barbe-bleue laisse revenir une heure plus tard Sveta vivante (mais à pieds), avec effectivement une invitation "officielle" pour une mission-marketing bidon chez les fils de Gengis Khan. Et le consulat de nous faire le visa malgré l'absence suspecte de la combinaison tailleur-chemise-maquillage de toute marketeuse qui se respecte.

Consulat de MOngolie à Irkutsk



Vendredi 15 Juillet

maison Olga, soeur, parents qui dorment à la dacha. immeuble très décati en périphérie d'Irkutsk, vue sur les plantations de choux des "chinois", juste en contrebas d'un grand cimetière... visite Irkutsk, centre très sympa, musée des Décabristes (nobles francophones et francophiles, inspirées par la révolution française et sa constitution (qui ne jurait pas encore que par la libre spéculation des zigotos)), révolte contre Nicolas II en 1825 et exil sibérien jusqu'à l'amnistie de 56. Dans la rue, je suis le "bolshoj djadja iz Moskvy" (grand mec de Moscou). Fatalement, avec mes mains d'intello, ma taille et ma dentition de bien-nourri-bien-soigné...on voit bien que je ne passe ni mes étés à bêcher à la dacha ni mes hivers à bouffer des soupes betteraves-couennes de porc, arrosées de vodka frelatée, pour combattre le bien-nommé froid sibérien.

Isba-titanic à Irkutsk

Samedi 16 Juillet

8h10, départ bus pour Ol'khon, île découpée à mi hauteur de la côte Est du Baïkal. Route de Yakutsk (brr) et glissades en bus dans la boue (impression bateau). 13h à MRS (réparation de moteurs, nom du village). steppe, mix bretagne/mont lozère. plein de marmottes, plutôt escarpé, idéal pour la luge de Septembre à Mai. ballade cerf-volant puis camping (visite du caïd local en side-car, très courant par ici).

Face à l'île Ol'khon

Dimanche 17 Juillet

Réveil 9h, froid et brumeux. stop 30km, re-très froid pdt une heure à Elantsa (10° ?). Encore 5 chauffeurs jusqu'à Listvjanka, embouchure de l'Angarsk, le seul émissaire du lac. Malgré l'eau très clair, le regard se perd dès 3-4 mètres du bord tant le fond est pentu. Mangeage d'omoul frit juste face au lac. camping dur car la montagne tombe raide dans le lac, seule un coin d'herbe au sein du village permet de poser la tente. Quelques énormes villas affreuses (chateaux disney rosâtres) - les oligarques locaux ou moscovites ? et pas mal de dachas d'Irkutsk (50km).

Stop entre Irkutsk et le Bajkal

Lundi 18 Juillet

musée Baïkal. effectivement, à 100m du rivage la profondeur est de 1400m, c'est un précipice, une énorme entaille dans la croûte terrestre. bac à travers l'angarsk (pierre du chaman) et arrivée à Port-Baïkal à 16h. Trou suprême, pas de route, juste un train ce soir à 2h du matin...et le suivant 3 jours plus tard ! Très froid jusqu'à la montée dans le train, le Baïkal est thermostaté à 4°, jusqu'à 10° sur une mince couche supérieure. et plus d'1m de glace en hiver (icebergs jusqu'à mi-Juin paraît-il !), qui permet de faire une route qui traverse tout droit le lac, 50km au lieu de 200. train à 2 wagons hors d'âge, 6h pour rallier Sljudjanka à 90km d'ici. pas mal de jeunes campeurs russes en vacances.

Port Baïkal

Mardi 19 Juillet

on arrive à la gare de Sljudjanka à 8h, stop direction Ulan-Ude à 350km d'ici. depart facile (les irkutskiens qui vont à la dacha) mais on reste en rade plusieurs heures ds la foret sur la frontière bouriate. Un transporteur de néphrite bouriate nous prend pour ne pas s'endormir (rythme de fou). camping aux portes de la ville ds l'herbe dessechée infestée de criquets et de moustiques.

Bol'shoj djadja iz Moskvy i Burjat

Mercredi 20 Juillet

traversée éclair d'Ulan-Ude, départ de la gare routière en minibus, direction Kjakhta (poste frontière avec la mongolie, petite ville avec garnison militaire). Sur la route : paysage semi-désertique, pas super gai (en particulier près de Gusinoe Ozero, à imaginer l'hiver par moins 30...). arrivée à Kjakhta, on achète tomates et concombres pour notre diner sans se douter que ce seront nos derniers légumes verts (ou rouges) pour les 10 jours à venir. Arrivée au poste frontière routier (4-5km de la ville) : quelques cahutes ds les 100m séparant une double clôture, une queue énormes de camions (grumes principalement) et voitures particulières. Ca trafique à mort, les "Russes" (ou Mongols, ou Bouriates, qui sait...) passent des quantités impressionnantes de bière (Jigulevskoe, la pire), stockées en palettes sur le parking en plein soleil. Pour passer, faut être ds un véhicule : les particuliers font raquer assez cher (ce ne sont pas des touristes, quasi exclusivement des gens qui font autant d'aller-retour sur la frontière qu'il est possible, chaque fois le véhicule chargé à bloc. On finit par passer gratos ds un car de mémés bouriates parties faire du tourisme à Oulan-Bator, qui nous dépose juste de l'autre côté, en pleine steppe. On plante la tente, Gengis, t'as plus qu'à bien te tenir !

Jeudi 21 Juillet

stop payant jusqu'à Soukhe-Bator, le symmétrique mongol de Kjakhta (un peu plus loin, un peu plus grand). quelques silos à grains soviétiques désaffectés. déjà du bétail un peu partout dans la steppe (les rarissimes arbres sont couverts de sac plastiques bleus dégueu - c'est une coutume bouddhiste et non un remake de la décharge marseillaise de Saint Martin de Cros). Ville assez terne, plutôt déserte et poussièreuse. Encore une fois, on est en Juillet et je me demande ce que ça donne en hiver. Minibus jusqu'à Oulan-Bator : comme en Russie, on attend que le minibus soit plein avant de partir, sauf qu'ici les gens voyagent encore moins (les vacances étant comme partout un truc de riche - que nous sommes objectivement au regard de la pop. locale) et donc le remplissage est très long (3-4h assis à côté du minibus, c'est tout à fait normal).  Sur la route, notre premier troupeau de chameaux ds la steppe ! Je ne pensais pas les voir autant au nord.
Dakhan après 4h de route, deuxième ville du pays ; changement immédiat pour Oulan Bator (4h encore). arrivée le soir ds une AJ sympa mais bourrée de français bruyant style "on est trop cool nous, on a tout compris du pays et on fait des excurs' trop top !". On dort dans une yourte ! certes, avec six lits style européens à l'intérieur, ça fait moins classe.

Vendredi 22 Juillet

Oulan-Bator. Monastère avec Bouddha géant et rouleaux-prières. Marché, ville sans plaques d'égouts, dames-téléphone. bouffe locale ds un boui-boui : *** (énormes raviolis à la viande) et *** : thé salé avec du lait (de jument ?) et de la graisse (de mouton ?). à gerber, mais, suivant des préceptes familiaux qu'on m'a patiemment inculqués, j'ai fini mon bol (pas Sveta, la maligne).

Roulez, c'est prié !

Samedi 23 Juillet

Voilà, le thé était effectivement à gerber, ce à quoi je consacre ma journée. Sveta part se balader en ville pdt que je reste entre lit et chiottes (c mieux qu'entre vie et mort) à maudire la graisse de mouton. Sa simple évocation me donnera tout le séjour des haut-le-coeur, ce qui est assez malheureux ds un pays où, justement,  le mouton est à peu près le seul truc qui pousse. Disons qu'en dehors de viande et produits laitiers, les seuls légumes sont les sacs de farine de 50kg importés de Russie...encore qu'à Oulan Bator on trouve d'autres trucs, on est qd même sur la voie de communication principale (unique) du pays : ici passe LA ligne de train (transmongolien) et LA route goudronnée.

Dimanche 24 Juillet


Lundi 25 Juillet


Mardi 26 Juillet


Mercredi 27 Juillet


Jeudi 28 Juillet


Vendredi 29 Juillet


Samedi 30 Juillet


Dimanche 31 Juillet


Lundi 1er Août

grippe aviaire

Mardi 2 Août


Mercredi 3 Août



Jeudi 4 Août