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Appel à communication

La syntaxe moderne s'est généralement constituée autour d'analyses orientées vers les propriétés formelles des phrases et de leurs constituants. Les phrases sont souvent analysées indépendamment de tout ancrage énonciatif et plus encore, générique. Forte de cette perspective, la syntaxe ne considère pas comme centraux dans le champ qu'elle occupe, les phénomènes de variations grammaticales, ni les spécificités relatives à la nature différente des performances linguistiques. De la même façon, les approches textuelles -- dans la tradition de la textométrie ou de l'analyse du discours - ont assez peu pointé les caractéristiques syntaxiques propres aux genres qu'elles étudient, étant plus attentives aux particularités lexicales ou énonciatives. Il s'ensuit qu'un genre textuel est rarement caractérisé par sa spécificité syntaxique. Quant à la stylistique, discipline la plus à même d'étudier les particularités linguistiques, son ancrage trop académique et son manque d'outillage l'obligent souvent à circonscrire son analyse à des unités souvent pertinentes mais restreintes et isolées.

Les analyses automatisées permettent cependant depuis quelques années de mieux identifier les spécificités lexico-grammaticales des textes, et donc des genres. Il existe deux grandes approches, la première étant largement plus développée que l'autre :

  • l'approche « paradigmatique » reposant sur la quantification des catégories morpho-syntaxiques employées. Par exemple, dans son analyse du discours oral en milieu universitaire, Biber (2006) met en évidence le sur-emploi (par rapport à l'écrit) des pronoms de premières personnes, des expressions évaluatives (verbes « mentaux », adverbes énonciatifs, etc.), des WH questions, etc. Par factorisation, il est possible de dégager des faisceaux de propriétés génériques donnant la cartographie d'un genre.
  • l'approche « syntagmatique »  privilégiant la çcombinatoire des unités lexicales, le repérage des séquences syntagmatiques préférées (ou évitées) par un genre. A titre d'exemple, donnons un patron lexico-grammatical (Larjavaara et Legallois en prép.) - que l'on désigne parfois par le terme de motif (Quiniou et al.2012, Longrée et Mellet 2013) ce N si ADJ et si ADJ. Ce motif, sémantiquement évaluatif, est spécifique du genre « Mémoires » au 19e siècle (comparé aux genres Récits de voyage, Romans, Correspondances, Essais de la même époque) :
  • Oh ! Tant mieux, tant mieux de n' être pas bornés par ce temps si court et si triste ! E. de Guérin, Journal (1834-1840)

    Seulement, pour ne pas faire acte de désobéissance et de bravade envers cette mère si tendre et si aimée, Maurice lui annonça […]  un petit voyage au Blanc. G. Sand, Histoire de ma vie, 1855

    On éprouve aujourd'hui encore, comme autrefois, une grande douceur intérieure à voir ces lieux si bénis, et maintenant si abandonnés. Mgr Dupanloup, Journal intime, 1876

Cette journée Conscila consacrée à l'analyse de la grammaire et de la stylistique des genres discursifs, a pour objectif de réunir des chercheurs en linguistique ou en TAL dont les travaux portent sur l'identification des caractéristiques lexico-grammaticales des textes. Les travaux soumis devront prendre en compte la contrainte de l'exhaustivité : on ne s'intéressera pas à un seul type de formes, mais à maximum d'éléments spécifiques d'un genre. Les points suivants pourront être abordés :

- les techniques d'identification des propriétés génériques ;

- la complémentarité ou compétitivité entre approches paradigmatiques et syntagmatiques ;

- l'interprétation des données.

Les propositions de communication porteront donc sur la caractérisation des genres discursifs (littéraires ou non) ou des styles, dans une perspective exhaustive ; elles aborderont les méthodes, sans négliger la description linguistique. Elles peuvent être étendues à la comparaison entre auteurs, ou porter sur des registres, des pratiques discursives ou encore sur des formes telles que les séquences textuelles (narrative argumentative, descriptive, etc.).

Les travaux peuvent porter sur toute langue, et les genres abordés peuvent être oraux ou écrits.

Les perspectives peuvent être variables : informatiques, didactiques, stylistiques, discursives, syntaxiques.

Les communications se feront en français ou en anglais.

1- Une intention de communication sera envoyée mi-septembre aux organisateurs à l'adresse : dominique.legallois@unicaen.fr

2- Une proposition d'une page minimum devra être soumise pour le 1er novembre 2014.

La réponse aux auteurs sera transmise le 20 novembre 2014.

Références

Biber D. (2006)  University language:  A corpus-based study of spoken and written registers.  Amsterdam:  John Benjamins

Biber, D. and S. Conrad 2009: Register, genre and style. Cambridge: Cambridge University Press.

Dorgeloh, H. and A. Wanner (eds) 2010: Syntactic variation and genre, Berlin/New York: De Gruyter Mouton.

Larjavaara M et Legallois D. (en prép.) « Les genres discursifs et leur grammaire »

Longrée D. et Mellet S. (2013. « Le motif : une unité phraséologique englobante ? Étendre le champ de la phraséologie de la langue au discours », Langages 189 (D. Legallois et A. Tutin, coord.), p.68-80

Martin, J. R. and Rose, D. (2008) : Genre relations. Mapping culture. London: Equinox.

Quiniou S., Cellier P., Charnois Th. and Legallois D. (2012)«  What About Sequential Data Mining Techniques to Identify Linguistic Patterns for Stylistics ? » in Lecture Notes in Computer Science, Springer Vol. 7181, pp 166-177

Revue Linx, n° 64-65, « Les genres de discours vus par la grammaire », sous la direction de M. Krazem.